Le taux de survie des entreprises reprises est un peu plus élevé que celui des entreprises créées. Pourtant la moitié des entreprises susceptibles d’être rachetées disparaissent faute de repreneur. Alors, la meilleure solution pour devenir chef d’entreprise est-elle vraiment de tout créer de zéro ?
Racheter une entreprise ?
Certains chefs d’entreprise partent de rien, font germer leur « jeune pousse » dans un incubateur et finissent par trouver le moteur suffisant pour actionner les leviers de développement. D’autres vont préférer s’appuyer sur un projet existant pour faire ressortir la pépite qui sommeillait derrière les difficultés.
Cependant, trouver un marché porteur pour développer une activité, trouver des locaux, des équipements, embaucher, construire et faire exister sa marque, démarcher et fidéliser sa clientèle peut s’avérer trop long et trop risqué pour ceux qui préfèrent gagner du temps en reprenant une entreprise existante, mise en vente par son dirigeant.
D’après l’Observatoire BPCE, environ 185 000 entreprises sont susceptibles d’être cédées chaque année en France.
75 000 entreprises sont rachetées, dont 15 000 d’entre elles concernent des artisans et des commerçants et 60 000 sont des sociétés commerciales.
Parmi les entreprises susceptibles d’être rachetées, il y a des entreprises en difficulté, d’autres pour qui le dirigeant arrive à l’âge de la retraite ou toute autre raison. Le rachat d’une entreprise en Redressement Judiciaire à la barre du Tribunal de Commerce n’est pas une opération qui peut se faire à la légère.
75 000 entreprises sont rachetées chaque année en France
Qu’est-ce que la reprise d’entreprise ?
Parmi les raisons qui poussent les repreneurs à franchir le cap, certaines sont liées à des raisons extérieures, telles qu’un plan de licenciement, une restructuration, ou simplement la vente de la société par le précédent dirigeant.
La reprise d’entreprise consiste à reprendre la gestion d’une entreprise déjà existante.
Elle permet, selon les circonstances, de sauver une entreprise en faillite économique, ou de poursuivre une activité bien implantée comme un commerce local.
Parfois, il s’agit avant tout pour le repreneur d’un investissement financier destiné à être rentable à moyen terme. En achetant au meilleur prix la bonne entreprise au bon moment, et en sachant la restructurer efficacement, certains spécialistes arrivent à redonner de la valeur à des structures avant de les revendre avec une plus-value confortable.
Qui peut reprendre une entreprise ?
La reprise d’entreprise par les salariés de l’entreprise en difficulté
Lorsque la société est en difficulté, les salariés peuvent reprendre leur outil de travail sous la forme d’une société coopérative de production (SCOP).
Toute société, quelles que soient sa forme et son activité, peut devenir une SCOP sans qu’il soit nécessaire de créer une nouvelle entreprise.
Il suffit d’en modifier les statuts.
La SCOP est gérée et dirigée collectivement par les salariés associés, les repreneurs, qui détiennent la majorité du capital.
Elle peut devenir une société coopérative avec un statut de société anonyme (SA), de société par actions simplifiée (SAS) ou de SARL.
Les salariés y sont associés majoritaires (51 % du capital social) et détiennent au moins 65 % des droits de vote, leur permettant ainsi d’élire leur dirigeant.
Il existe des avantages fiscaux pour aider les repreneurs à relancer l’activité de leur entreprise : ils sont notamment exonérés de l’impôt sur les sociétés si le résultat est affecté pour une moitié aux salariés et l’autre dotée en réserve.
Par exemple, la société CERALEP qui fabrique des isolateurs électriques en porcelaine dans la Drôme depuis 1921 a connu de nombreux propriétaires. Merlin Gerin, puis Alstom, puis un groupe Austo-Suédois, puis un fond de pension américain, … Depuis 2004, 52 salariés se sont rassemblés pour reprendre l’entreprise sous forme de coopérative. Les emplois et le savoir-faire français ont ainsi été sauvés.
La reprise d’entreprise par un tiers extérieur à l’entreprise
La reprise d’entreprise peut aussi être le fait d’un tiers extérieur à celle-ci.
C’est, dans certains cas, une aubaine pour acquérir un brevet, des outils de production ou une clientèle.
Le repreneur investit les sommes nécessaires à la reprise, il place un gérant ou assure lui-même la gérance et accompagne dans la sortie des difficultés.
En contrepartie – la philanthropie étant rarement de mise dans le business –, il récupère des droits d’utilisation gratuite dudit brevet, accroît la production à l’appui de nouvelles machines, développe sa clientèle et sa renommée…
Le risque dans ce genre de pratique est que l’entreprise devienne un bien ; une fois remise d’aplomb, après un délai de 3 ans pour présenter un bilan comptable complet, le repreneur peut à son tour revendre l’entreprise.
Reprendre une entreprise : quelles questions se poser ?
Avez-vous les compétences requises ?
A part pour certaines professions réglementées, la question des compétences n’est pas primordiale, ce sera la motivation du ou des repreneurs, leur capacité à se connaître eux-mêmes et l’humilité dont ils feront preuve en acceptant d’être perfectibles qui primeront sur les diplômes et l’expérience entrepreneuriale antérieure.
Si vous connaissez vos atouts et vos axes d’amélioration, vous aurez toujours la possibilité de vous former ou de vous appuyer sur les bonnes personnes. Savoir s’entourer est essentiel à la réussite d’une reprise d’entreprise.
Les dirigeants sont, quels que soient leur tempérament et leur formation initiale, des meneurs d’hommes qui sauront fédérer autour du projet et développer leur activité.
Quel type d’entreprise reprendre ?
Vous devez vous interroger tout d’abord sur le secteur géographique où vous voulez vous installer.
En effet, l’investissement personnel sera grand et vous devez vous sentir bien dans votre environnement. Par-exemple, l’isolement en zone rurale pour un « ultra-urbain » va constituer un désavantage parce qu’il devra apprendre à s’adapter en plus de l’investissement personnel dans la société.
Le secteur d’activité peut constituer un point de repère pour déterminer la zone géographique où porter ses recherches.
Par exemple, vouloir reprendre une société pour la développer à l’international sera plus aisé à proximité d’infrastructures de transport (aéroport, échangeur d’autoroute, zone portuaire, etc.).
Le secteur d’activité, surtout lorsque la reprise d’une entreprise est jumelée avec une reconversion professionnelle, devra correspondre à vos valeurs ; cela vous aidera à trouver la force de mobiliser votre énergie personnelle face aux difficultés.
La taille et le type de l’entreprise, c’est-à-dire son chiffre d’affaires, le nombre d’employés, son statut et son ancienneté sur le marché, entrent en ligne de compte pour choisir.
Les enjeux de la reprise d’une start-up ne sont pas les mêmes que ceux d’une entreprise familiale ou ayant une bonne notoriété.
Le potentiel humain de l’entreprise reprise et les compétences des salariés sont importants parce que ce seront les premiers intéressés par la reprise et du fait que la reprise impose le maintien des contrats de travail et de l’ensemble des avantages acquis.
Enfin, c’est bien évidement le prix de cession de l’entreprise qui peut être décisif dans la décision finale. C’est du coût global de l’entreprise dont il faut tenir compte, en incluant les travaux de mise aux normes, de mise en conformité avec les réglementations professionnelles en vigueur, les dettes et le potentiel de retour sur investissement.
Comment choisir une entreprise ?
Pour choisir une entreprise, l’évaluation de sa situation est importante. Pour cela, plusieurs éléments concourent pour mesurer les risques que vous accepterez de prendre :
- les documents comptables des trois derniers exercices : bilans, comptes de résultats, chiffres d’affaires, marges brutes et nettes ;
- les outils de production : les locaux nécessitent-ils des investissements ? Sont-ils à proximité des transports ? Quel est l’état du stock, des matériaux, quels seront les volumes à compléter ?
- la masse salariale : les employés sont-ils jeunes ou faudra-t-il envisager de nouveaux recrutements ? De nouvelles formations internes doivent-elles être envisagées pour une remise à niveau ? À quelle échéance ? Quels sont les statuts et les contraintes ou atouts en matière de flexibilité ?
- quel est le statut de l’entreprise ? Quels sont les avantages fiscaux associés ? Quelles sont les modalités pour changer le statut juridique de l’entreprise ?
Il conviendra a minima de bien évaluer la santé de l’entreprise à partir de ses bilans.
Avantages et inconvénients de la reprise d’entreprise
Les avantages de la reprise d’entreprise
- Les délais : la reprise d’entreprise est plus rapide que la création, même si cibler la bonne affaire en adéquation avec les critères du repreneur peut prendre plusieurs mois.
- Un outil de travail opérationnel et une clientèle acquise : le dirigeant repreneur peut commencer dès l’acquisition, sans problématique d’embauche, à travailler.
- Un chiffre d’affaires en back up : le repreneur ne subit pas les longs mois d’installation avec la montée en puissance de l’activité et tous les aléas administratifs inhérents à la création d’entreprise. Il pourra même, normalement, se dégager une rémunération rapidement.
- Une existence financière : les trois derniers bilans et comptes de résultats de l’entreprise apportent du crédit au projet du repreneur, lui permettant de trouver des financements bancaires plus sereinement. Le patrimoine pourra également constituer des garanties d’emprunt pour investir dans la reprise. Enfin l’entreprise sera beaucoup plus crédible pour répondre à des appels d’offres publics.
- Une force de travail humaine : la reprise d’entreprise implique la reprise des contrats de travail. Le repreneur dispose ainsi, dès le commencement, de son activité, des salariés et, s’il le souhaite, il pourra se consacrer au management et au développement de l’activité.
Les inconvénients de la reprise d’entreprise
La concurrence est rude entre les repreneurs, tous voulant trouver la bonne affaire !
De plus, même si les témoignages montrent que la très grande majorité des repreneurs ne le regrettent pas et que le taux de survie des entreprises reprises est plus élevé que le taux de survie des entreprises créées (60 % à 5 ans contre 50 % pour les autres), les repreneurs sont rares et la moitié des entreprises susceptibles d’être rachetées disparaissent faute de repreneur.
En proportion, la reprise coûte plus cher qu’une création et nécessite un plus gros apport personnel, même si les financements peuvent être plus accessibles du fait de garanties préexistantes.
Si les salariés constituent un atout, ils peuvent aussi être un handicap parce qu’ils vivront la reprise comme une modification de leurs habitudes de travail. Sortir de sa zone de confort peut entraîner un mal-être qui aura des répercussions sur la productivité, l’absentéisme, etc.
Pour conclure, il faut garder en tête que la reprise d’entreprise est une démarche entrepreneuriale pour tout dirigeant qui s’ignore (le cas des SCOP), en devenir ou aguerri.
C’est une aventure humaine qui conjugue prise de risque et goût du maintien d’une activité dans un secteur de marché et sur une zone géographique donnée.
La cession en elle-même est une succession d’étapes administratives et juridiques.