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Après une procédure de sauvegarde pour Camaïeu, l’enseigne a été reprise par ses créanciers

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Camaïeu est une chaîne française de magasins de « fast fashion » créée il y a plus de 30 ans. Leader sur le marché de la mode féminine en France, la marque est distribuée dans 650 magasins et emploie 5 600 personnes. Fragilisée par les difficultés du marché de l’habillement, Camaïeu souffre de la forte concurrence des enseignes internationales de fast fashion. Sa dette, pourtant réduite de moitié en 2016 était encore de 459 millions d’euros au moment de son placement sous procédure de sauvegarde.     

L’histoire de Camaïeu enseigne majeure de prêt à porter

A l’origine, 4 hommes, ayant travaillé pour des enseignes de la famille Mulliez, fondent Camaïeu en 1984. Ils veulent vendre bon marché, et en petites séries, des vêtements féminins renouvelés quotidiennement.

Ils lancent le principe de la fast fashion à la française dans leur premier magasin de Lens. La recette fonctionne bien et rapidement !

  • En 1991, naît Camaïeu homme puis en 1994, Camaïeu enfant, renommé ensuite Okaïdi.
  • En 1994, ce sont 200 boutiques qui tablent sur un chiffre d’affaires de 3,5 milliards de francs (530 millions d’euros).
  • En 2007, rapidement délestée des magasins homme et enfant, Camaïeu affiche un CA de 610 millions d’euros.

L’enseigne se distingue de ses concurrents Pimkie et Promod par le choix de circuits courts et par son ajustement permanent à la demande des clientes.

  • En 2017 et 2018, Camaïeu est nommé « enseigne de prêt-à-porter préférée des Français » selon un sondage BVA, devant H&M, Kiabi et Zara.

La marque reste leader sur le marché de la mode féminine française avec 11 % de part de marché, un chiffre d’affaires de près d’1 milliard d’euros et 37 millions de clientes.

Forte de ses 5 600 collaborateurs dans le monde au service de 650 magasins, l’enseigne roubaisienne reçoit chaque semaine 100 nouveaux produits.

Camaïeu, la marque qui tire son épingle du jeu sur un marché du textile en berne

Le secteur des boutiques spécialisées dans l’habillement peine à rebondir depuis la crise de 2008.

Plusieurs raisons expliquent le fléchissement des résultats :

  • la forte concurrence d’Internet
  • la pression des marques internationales telles que Primark ou H&M
  • la baisse et les changements de mode de consommation chez les ménages.

S’ajoute le manque de soutien aux entreprises de mode de la part du secteur bancaire, qui ne les aide pas à gérer les fonds de roulement nécessaires à leur fonctionnement.

Tati, comme Gérard Darel, Mim ou Sinequanone, ont connu des procédures collectives. Promod a supprimé 133 emplois en 2016. Pour Happychic (marques Brice et Jules), c’est 466 licenciements qui ont marqué l’année 2018.

Le groupe Vivarte traverse, lui aussi, de sérieuses difficultés. Alors qu’il s’était déjà délesté de Naf Naf et Chevignon quelques mois plus tôt, il vendait, fin 2018, plusieurs marques comme San Marina et Minelli pour se consacrer à La Halle et à Caroll.

Entre 2006 et 2016, c’est un recul de 14 % qui fragilise le marché de l’habillement. Le léger rebond de 2017 n’est pas suffisant pour parler de reprise.

Certaines enseignes ont su se restructurer et s’adapter pour tirer leur épingle du jeu. C’est le cas, par exemple, d’Orchestra qui a choisi l’expansion afin de réaliser des économies d’échelle plutôt que de resserrer son marché.

D’autres marques ont su choisir le bon cap dès leur création, comme la startup Le slip français, qui mise sur l’association des réseaux sociaux et des boutiques physiques ainsi que sur le made in France, cher au consommateur de l’hexagone.

Malgré la traversée d’une zone de turbulence, l’enseigne Camaïeu a de quoi rester optimiste.

Camaïeu a toujours été rentable malgré une lourde dette. Son chiffre d’affaires de près d’1 milliard d’euros la positionne parmi les leaders avec une croissance supérieure à celle du marché.

Si son CA a perdu 2,4 % en 2018, son résultat d’exploitation est passé de 82 à 85 millions entre mars 2017 et fin 2018.

Après avoir converti sa dette en capital, la réduisant ainsi de moitié en 2016, elle a entrepris de nouveaux chantiers pour 30 millions d’euros :

  • Elle continue de renforcer sa stratégie de vente en ligne afin de s’adapter aux nouveaux modes de consommation, et souhaite faire passer ses ventes internet de 5 à 15 % dans les années à venir.
  • Les boutiques ne sont pas oubliées puisque 200 d’entre elles ont été rénovées afin d’augmenter le trafic physique.
  • À cela, s’ajoute l’investissement informatique visant à gérer les stocks et analyser les ventes de manière précise pour éviter les ruptures. Enfin, Camaïeu se diversifie dans la lingerie.

Signature d’un accord entre l’enseigne et les créanciers

Être placée sous procédure de sauvegarde permettait à Camaïeu de suspendre le paiement des dettes afin de recouvrer une santé suffisante pour y faire face ensuite.

Sans pour autant être en état de cessation des paiements, elle trouvait ainsi une façon d’être protégée temporairement.

Le contexte de crise dans le secteur de l’habillement , associé à une lourde dette de 459 millions d’euros, ont amené les dirigeants à rechercher « un peu de respiration au niveau de la dette » selon l’un des porte-paroles. Les créanciers, des fonds d’investissement, n’ont pas accueilli la nouvelle d’un bon œil.

Le tribunal de commerce de Lille a donc prononcé la sauvegarde le 15 octobre 2018 et nommé deux administrateurs. Selon une porte-parole, le but était « d’encadrer les discussions avec les créanciers ».

La dette avait déjà été réduite de moitié en 2016, par sa conversion en capital, mais elle restait lourde avec 459 millions d’euros.

Les créanciers, constitués du fonds luxembourgeois CVC, et des fonds américains Farallon et Carval, se montraient pourtant « prêts à supprimer la dette ». Ils n’ont donc pas accueilli la nouvelle d’un bon œil puisque ce type de procédure permet d’étaler la dette sur une durée de 2 à 9 ans et peut aboutir à un redressement judiciaire voire à une liquidation judiciaire.

Ils entendaient contester la décision. C’est un bras de fer qui s’est joué entre Camaïeu et ses prêteurs.

Finalement, le tribunal de commerce de Lille a mis fin à la procédure deux mois après sa mise en place, le 19 décembre 2018, après la signature d’un accord entre l’enseigne et les créanciers : la totalité de la dette est convertie en actions reprises par les prêteurs.

Ils acquièrent également tous les droits de vote.

En retour, ils apporteront entre 35 et 45 millions d’euros qui permettront à Camaïeu de poursuivre ses investissements.

Selon Nicolas Woussen, qui a pris la suite d’Elisabeth Cunin à la présidence de Camaïeu le 21 septembre 2018:

 « cette issue positive va permettre de poursuivre le déploiement du plan stratégique, avec une structure financière désormais allégée de la dette d’acquisition ».

C’est une excellente nouvelle pour les salariés.

L’enseigne roubaisienne n’a plus aucune dette aujourd’hui puisque celle-ci est effacée dans son intégralité. Les chantiers prévus par Camaïeu pourront ainsi être poursuivis et les nouveaux propriétaires constitueront leur conseil d’administration. La restructuration de Camaïeu est en marche afin de l’adapter à un secteur en berne et lui permettre de traverser la zone de turbulence sans trop de dommages.

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